Accueil 5 En débat 5 La lutte pour l’élimination de la discrimination raciale, où en sommes-nous ?

« I have a dream that my four little children will one day live in a nation where they will not be judged by the color of their skin, but by the content of their character. »
« Je fais le rêve que mes quatre jeunes enfants vivront un jour dans une nation où ils ne seront pas jugés par leur couleur de peau mais à la mesure de leur caractère. Je fais un rêve aujourd’hui. »

Martin Luther King, Jr.

Discours devant le Lincoln Memorial de Washington, 28 août 1963.

La journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale est célébrée chaque année le 21 mars.

Ce jour-là, en 1960, la police ouvre le feu et tue 69 personnes lors d’une manifestation pacifique à Sharpeville, en Afrique du Sud, contre les lois de l’Apartheid. En proclamant la Journée internationale, en 1966, l’Assemblée générale des Nations unies appelle la communauté internationale à redoubler d’efforts pour éliminer toutes formes de discrimination raciale. Hélas, 60 ans plus tard, l’Afrique du Sud est loin d’en avoir fini avec la question raciale.

Nous sommes toutes et tous concernés par cette question, les États-Unis, mon pays d’accueil, en particulier.

Pour mieux cerner le sujet, je recommande les travaux du think tank Center for American Progress[1]: d’énormes disparités de richesse entre les ménages noirs et blancs en Amérique existaient bien avant la pandémie de Covid-19 et se sont poursuivies pendant la crise. Les Américains ont généralement trop peu d’épargne d’urgence, mais ce manque à gagner pendant la pandémie a été bien pire pour les ménages noirs. Remédier à l’écart de richesse persistant et important est l’un des plus grands défis auxquels est confrontée l’égalité raciale en Amérique aujourd’hui. Réduire – et éventuellement éliminer – cet écart créerait des opportunités économiques plus nombreuses et meilleures pour tous les Américains. Les politiques et propositions du Président Biden, si elles sont adoptées, constituent un premier pas significatif.

Nous devons garder un œil vigilant contre toute forme de discrimination et peut-être s’inspirer de modèles républicains et finalement « inclusifs » à la française ?

There is no society : la société n’existe pas, ce sont les mots prononcés par Margaret Thatcher en 1987. Son message, entendu par les classes dominantes occidentales, a eu pour conséquence la grande sécession du monde d’en haut qui, en abandonnant le bien commun, a plongé les pays occidentaux dans le chaos de la société relative : « L’atomisation des mouvements sociaux et la communautarisation sont autant de signes de l’épuisement d’un modèle »[2].

Cela n’a rien d’anormal, le libéralisme économique total s’accorde harmonieusement avec le poids des communautés religieuses et raciales, chacun ayant son périmètre d’intervention et son agenda. Cela s’oppose fondamentalement au modèle républicain français, dans lequel l’État à la fois assure la cohésion entre les communautés et intervient sur le plan économique par des règlementations adaptées. Si chacun(e) revendique son identité comme un repli sur soi, le socle républicain se délite, les groupes atomisés passent plus de temps à se déchirer qu’à s’insurger contre les inégalités sociales provoquées par un capitalisme financier toujours plus gourmand.

Si nous ne voulons pas être réduits à être des acteurs économiques repliés sur une identité raciale ou politique et voir de nouveaux leaders surfer sur la vague raciste pour effrayer les peuples, les inciter au repli et au déclinisme, nous devons proposer une alternative à un morcèlement par communautés à outrance, les associer à la conquête d’un idéal laïque respectueux des religions pratiquées dans la sphère privée. Un monde ultra libéral, rêvé par certains, ne peut remplir cet objectif.

Ne pas s’accommoder de l’identity politics et placer l’humain au centre des débats nécessite du courage ; cela va de pair avec un programme économique qui remette au centre du jeu politique la lutte contre les inégalités, véritable ADN de la gauche[3].

Laure Pallez,
Administratrice de Français du monde-adfe
États-Unis

20/03/2022

[1] https://www.americanprogress.org/article/wealth-matters-black-white-wealth-gap-pandemic/

[2] Extrait du livre « No Society, la fin de la classe moyenne occidentale » de Christophe Guilly, Flammarion, 2018

[3] Cet article contient des extraits de l’article complet disponible ici : https://dev.francais-du-monde.org/2020/06/05/liberalisme-economique-et-communautarisme-font-bon-menage/

https://www.americanprogress.org/article/wealth-matters-black-white-wealth-gap-pandemic/

 

 

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