Accueil 5 L'association 5 Mahmoud, réfugié syrien à Istanbul

Virgile Mangiavillano est membre du Conseil d’Administration de Français du monde-adfe et président de la section d’Istanbul. Il a rencontré Mahmoud Shekhani quand il travaillait à Homs de septembre 2003 à août 2005 et il l’a retrouvé en 2015 à Istanbul. Il nous raconte son histoire. 

Mahmoud Shekhani, la soixantaine, est originaire de Homs en Syrie. Avant la guerre, c’était une gloire locale. Peintre et professeur de Beaux arts, il gérait le syndicat des artistes, organisait des expositions, des concerts, coopérait avec le service culturel de l’Ambassade de France. Il vivait heureux avec sa femme et ses 3 enfants.

Syndicat des artistes, Homs en Syrie, le 26 avril 2005

Syndicat des artistes, Homs, 26 avril 2005

Pendant la guerre, le bâtiment du syndicat est réquisitionné par l’armée officielle. Ses tableaux sont volés et les locaux sont saccagés.

Après avoir dans un premier temps refusé de quitter la Syrie, il débarque avec son fils à Istanbul en février 2015. Aucun plan en tête, seulement garantir un meilleur avenir à son fils bientôt en âge de devoir servir dans l’armée du régime.

Sur les rives du Bosphore, Mahmoud a la chance de trouver une pièce avec 2 lits superposés pour 200 euros par mois, dans le quartier central d’Aksaray. Plus rien à voir avec le standing de Homs, les fins de mois sont très dures pour parvenir tout simplement à manger à sa faim. L’intégration est également délicate en particulier dans le domaine professionnel et son fils se voit affronter une dépression face à l’absence d’alternative concernant la fin de son cursus secondaire.

Comme tous les Syriens qu’ils côtoient, père et fils veulent tenter l’aventure vers l’Europe. Une fois à Izmir, on leur dit d’aller à Bodrum. Là, ils patientent trois jours, mais au moment du départ, cela ne se passe pas comme prévu. Il avait été convenu de payer 1500 dollars aux passeurs, le reste de la somme devait être versé par un ami syrien une fois arrivés en Grèce. A l’embarquement, les passeurs ont exigé l’intégralité de la somme, Mahmoud et son fils ne sont pas montés à bord. Certainement une chance, 6 personnes se sont noyés pendant le voyage. Les 1500 dollars disparaissent avec les passeurs, et c’est avec quelques livres turques qu’ils retournent sur Istanbul, ou les galères s’accumulent. La coupe est pleine pour son fils qui décide de rentrer en Syrie où il compte terminer son éducation secondaire.

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Pour Mahmoud, la décision est prise: un avenir meilleur coute que coute en Allemagne. Après avoir réussi à lever les fonds pour un aller simple porté par cette lueur d’espoir, il arrive en Grèce, traverse les Balkans et parvient à fouler le territoire allemand en octobre 2015. Il régularise actuellement sa situation administrative, en s’accrochant à l’espoir de pouvoir faire venir un jour sa femme et ses trois enfants.

Virgile Mangiavillano 

autoportrait Mahmoud

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